Droit d'auteur LLD
Lecture de: "Droit de distribution" de Moyse
Olivier Charbonneau 2011-03-01
Il y a de ces livres qui vous tombent sous la main par hazard, au détour d’une visite à une bonne librairie, que l’on s’empresse d’acheter et qui nous suivent dans tous nos déplacements dans l’espoir d’avoir quelques moments pour poursuivre notre lecture. Il y a même ces livres dont les auteurs ont la gentillesse de dédicacer (merci Pierre-Émmanuel). J’ai enfin pu terminer la lecture d’un tel livre :
MOYSE, Pierre-Émmanuel. Le droit de distribution : analyse historique et comparative en droit d’auteur. Cowansville : Éditions Yvon-Blais, 2007. 720 p. (ISBN 978-2-89635-099-5)
Ce livre, qui est en fait la thèse doctoral de professeur Moyse, défend l’hypothèse que le droit d’auteur est un « droit de distribution » – et plus particulièrement, que la distribution est l’analogie qui domine et sous-tend le développement du droit d’auteur. L’auteur reprend la question depuis les tous débuts du droit d’auteur, depuis les premières lois en Angleterre et en France, puis les efforts au niveau international.
Le volume se lit comme un roman, du moins pour ceux qui peuvent voir des protagonistes en les divers intervenants du milieu, de l’action dans chaque revendication et des dénouements dans chaque changement législatif. Un travail solide, très bien écrit et érudit.
J’ai particulièrement apprécié les recensements effectués entre chaque mouvement législatif – qui correspondent à l’édiction de certains textes législatifs, à leur modification et aux préparations aux discussion au niveau international (mot fétiche: plénipotentiaire).
On y apprend, par exemple, que les auteurs n’étaient pas présents dans les premiers textes législatifs de l’Angleterre (1708) et de la France (1793). Le copyright et la propriété littéraire ne bénéficiaient que les éditeurs puisqu’il était reconnu que les auteurs leurs cédaient tous leurs droits lors de la mise sous impression de leurs oeuvre. Il a fallu les efforts de certains grandes plumes (Victor Hugo, Dickens…) au 19e siècle, qui réagissaient au pillage de leurs oeuvres aux USA (entre autres) pour reconnaître le rôle de l’auteur dans ce cadre législatif.
Un autre point très intéressant concerne l’avènement du caractère international du droit d’auteur – un droit mondialisé avant l’heure – et surtout comment le Canada, petite colonie, joua du coude pour affirmer sa souveraineté. Le droit d’auteur est réellement un enjeu économique depuis plusieurs centaines d’années !
J’ai moins aimé le traitement réservé à la question du droit de prêt public. Il faut comprendre qu’il s’agit d’un point très mineur (quelques pages tout au plus) mais je suis surpris que l’auteur ne recense pas les sources juridiques de ce programme au Canada et qu’il l’assimile d’amblée au droit d’auteur (ce qui n’est pas le cas au Canada, sauf dans la rhétorique de certains groupes). Il faut dire que j’ai été membre de l’exécutif de la Commission de droit de prêt public pendant 4 ans et que cette question me tient à coeur. Mais on passe outre ce petit point assez rapidement vu la qualité du travail accompli !
Il faut dire que l’auteur s’attaque à la question du droit d’auteur numérique avec aplomb et intelligence. Débutant l’analyse depuis les textes de réflexions Européens, des USA et du Canada, il trace des liens entre les théories du droit d’auteur et les diverses évolutions législatives. Une section des plus éclairantes.
Enfin, la bibliographie figure parmi les plus complètes sur la question – une réelle source d’inspiration pour un doctorant… bravo !
Il faut dire que les heures d’éveil passé avec ma fille naissante au beau milieu de la nuit ont contribuées à ma lecture de ce tome. En fait, je suis ravi de vous apprendre qu’elle m’écoutait amoureusement – tel un chérubin ! – lors de ma douce lecture nocturne… Malgré son très jeune âge, elle montre déjà un intérêt marqué pour le droit d’auteur…
CultureLibre.ca LLD Test
Soutien à la culture numérique : réflexions
Olivier Charbonneau 2011-02-24
Je me suis fait contacter pour participer à une étude sur le financement public des arts. Voici mes réponses :
Quelles sont les opportunités pour les communautés culturelles ?
En deux mots : l’accès libre (open access). Qu’il s’agisse de l’emploi de licences permissives telles les licences Creative Commons pour son propre contenu ou la réappropriation du contenu libre d’autrui, ces outils juridiques permettent de maximiser l’accès à ses créations afin de créer un engouement auprès de son public potentiel. Il s’agit d’utiliser un effet de levier pour ses actifs intellectuels par la diffusion ou la distribution libre afin de capter un marché. Un exemple fascinent au Canada est le groupe montréalais Mister Valaire. Ils ont trouvé un moyen de « monétiser » l’accès libre à leur musique.
Quels sont les défis?
En trois mots et demi : la mort de l’exemplaire. Les exemplaires (the copies of a work) étaient le paradigme dominant pour gérer les chaînes de distribution de produits culturels. Dans l’environnement numérique, la distinction entre l’original et l’exemplaire s’estompe. Tout original est exemplaire et toute copie est originale. Cette distinction extrêmement poreuse confond les professionnels dont les pratiques sont en mutation. De plus, cette mutation se reflète dans la rhétorique entourant le cadre juridique qui s’impose: le droit d’auteur. Si l’on considère les revendications des créateurs et de l’industrie dans le contexte de réforme perpétuelle du droit d’auteur, il est possible de constater que l’enjeu est de bloquer une réelle mutation de leurs industries par une réforme particulière du droit d’auteur. L’enjeux est l’innovation mais la perception dominante vise le maintient des acquis des économies des exemplaires de biens culturels par une conceptualisation nouvelle du droit d’auteur.
Quid des organismes de soutien culturel?
L’impératif d’une participation publique dans le processus de création culturelle découle de difficultés des marchés économiques culturelles : la nécessité d’investissement massif en amont, les revenus qui n’arrivent qu’après qu’un produit culturel soir « fini » et la facilité de copie par autrui. Ces difficultés génèrent des risques pour les intervenants (accès au capital, financement, évaluer le potentiel d’un marché), des coûts de transactions (mutualisation de biens culturels pour créer une offre riche et diversifiée) et éventuellement à divers défaillances de marchés (market failures), telles la difficulté d’identifier les titulaires d’un droit d’auteur. Dans l’environnement numérique, la charpente intellectuelle qui soutient l’impératif d’un investissement étatique ne change pas, mais la « valeur » de chacune des variables (variables indépendantes des risques et des coûts de transactions et la variable dépendante des défaillances de marché) identifiées est à revoir. En fonction de la nouvelle compréhension de ces paramètres, les états pourront mieux comprendre comment intervenir directement dans les marchés culturels afin d’atteindre les objectifs de leurs politiques culturelles.
Accès à l'information Internet LLD UNESCO
Droit d'accès à Internet – rapport de l'UNESCO
Olivier Charbonneau 2010-09-12
L’UNESCO a présenté une version préliminaire du rapport intitulé “Freedom of Connection – Freedom of Expression: The Changing Legal and Regulatory Ecology Shaping the Internet” lors du Forum sur la Gouvernance d’Internet (14-17 septembre 2010). Selon l’agence des Nations Unies :
Le rapport offre une perspective nouvelle sur la dynamique sociopolitique derrière ces forces mondiales et les menaces qui pèsent sur la liberté d’expression. Il propose un cadre conceptuel sur “l’écologie de la liberté d’expression” pour élargir le débat concernant les politiques et les pratiques en la matière. Le rapport fait la synthèse de travaux de recherche empirique et présente des études de cas des pratiques techniques, juridiques et réglementaires qui s’imposent, notamment les évolutions dans six domaines interdépendants :
1. pratiques techniques en matière de connexion et de déconnexion, tel le filtrage de contenu ;
2. droits numériques liés à la liberté d’expression et à la censure, directement ou indirectement, tels les droits en matière de liberté d’information et de protection des données et de la vie privée ;
3. politique industrielle et réglementation : droit d’auteur et propriété intellectuelle, stratégies industrielles, TIC au service du développement ;
4. droits des internautes : fraude, protection des enfants, décence, diffamation et contrôle des propos incitant à la haine ;
5. politiques des réseaux et pratiques : normes, identité et réglementation des fournisseurs de services Internet ;
6. sécurité : du contrôle des spams et virus à la protection de la sécurité nationale.
L’étude montre clairement que la liberté d’expression n’est pas un sous-produit de l’évolution technologique. Elle doit être protégée par des dispositions juridiques et réglementaires permettant de concilier des intérêts et des valeurs en conflit potentiel, dans une configuration mondiale complexe. L’UNESCO invite tous les acteurs à donner leur avis sur le rapport provisoire présenté au FGI avant la publication officielle à la fin de l’année 2010.
Quoi que l’emphase soit mise sur la liberté d’expression, ce rapport de 104 pages en anglais recense plusieurs aspects juridiques de l’accès à Internet et des technologies de l’information et des communications.
Google Livre et édition LLD Numérisation
Est-ce la numérisation de masse détruit les marchés du livre ?
Olivier Charbonneau 2010-09-06
Hannibal Travis du Florida International University College of Law se questionne sur l’impact des projets de numérisation de masse sur les marchés du livre. Il propose une étude concernant les ventes ou chiffre d’affaire des éditeurs qui s’objectent au Google Book Search et découvre que leurs affaires vont mieux que l’économie en général.
Travis, Hannibal, Estimating the Economic Impact of Mass Digitization Projects on Copyright Holders: Evidence from the Google Book Search Litigation (July 1, 2010). Journal of the Copyright Society of the USA, Vol. 57, 2010. Available at SSRN: http://ssrn.com/abstract=1634126
Bibliographie LLD
Lecture de «Copyright Licence under Canadian Law»
Olivier Charbonneau 2010-07-23
Ce billet recense le livre suivant :
The legal nature of the copyright licence under Canadian law
by Brand, Frederic, LL.M., University of Toronto (Canada), 2005, 65 pages; AAT MR07328
Il s’agit d’une lecture effectuée dans le cadre du séminaire doctoral (DRT-7009) avec professeur Pierre Trudel de l’Université de Montréal.
L’auteur propose que les trois types de transactions basées sur le droit d’auteur sont l’assignment of copyright, la proprietary licence (which establishes an interest, usufruit) la non-proprietary licence (permission to use). Ils sont en fait des instruments dans un contexte de droit d’auteur.
Le contrat à proprement parler n’est qu’un type de véhicule où les contractants stipulent leurs volontés. L’autorisation de poser certains usages exclusifs en est l’exemple fondamental. Les «transactions» constituent le cas type à analyser et l’auteur note un manque au niveau de la terminologie et des pratiques.
La licence est un type de contrat qui réfèrent à une œuvre, et n’inclus pas toujours le créateur original, surtout dans les cas d’utilisation sous licence. Par contre, le créateur original conserve certains droits inaliénables, comme les droits moraux, ou d’autres droits à son avantage, tels le droit de première vente ou de suite. Ils peuvent aliéner leurs droits d’une manière exclusive ou non.
Voici quelques références choisies du texte de Brand. Pour chaque référence, nous indiquons l’endroit dans le texte de brand où la référence apparaît. La plupart de ces références traitent de la question des licences dans le droit d’auteur et elles ont été choisies sur la base de leur intérêt pour notre projet doctoral:
Capitaliser le savoir: réduire l’incertitude que suscitent les sûretés constituées sur les droits de propriété intellectuelle. Ottawa, 2004. xvii, 112p. Références. 24cm. Couverture souple.
Title: Leveraging Knowledge Assets: Reducing Uncertainty for Security Interests in Intellectual Property
Author: Law Commission of Canada; Commission du droit du Canada
Description: Report to Minister of Justice
URI: http://hdl.handle.net/10222/10279
Date: 2004
Compo Co. Ltd. v. Blue Crest Music Inc. et al., [1980] 105 D.L.R. (3rd) 249 at 261
COUR SUPRÊME: Compo Co. Ltd. c. Blue Crest Music et autres, [1980] 1 R.C.S. 357
p. 55: quoting the court: « copyright law is neither tort law nor property law in classification, it is statutory law. »
Handa, Sunny, Copyright Law in Canada, Markham ON, Butterworths 2002
p. 55: Handa is quoted as saying (at p. 134): « A modern understanding of copyright reveals it to be closer in form to a regulatory framework rather than a regime of property rights. »
Hurst v. Picture Theatres Ltd. [1915] 1 K.B. 1 (C.A.)
p. 53: distinction entre ‘grant of interest’ et ‘proprietary interest’
I.G.U. (Ingraph) Inc. v. L.B.G.P. Consultants Inc. (1990), J.E. 90-1224 (Que. Sup. Ct.)
p. 47, footnote 94: revendication des droits d’un logiciel bâti et utilisé sous licence exclusive. L’usufruit (au sens du Droit Civil) de la licence ne crée pas un droit d’injonction avant litige au sens du Code de procédure civile. Le juge a employé la doctrine civiliste que la location n’est pas usufruit.
Les Éditions de la Table Ronde v. Cousture (20 Sept. 1995), Montréal 500-05-015624-933 (C.S.Que.)
p. 34: « les tribunaux n’ont pas eu a se pencher fréquemment sur la notion de cession ou licence en matière de droit de l’auteur. »
Miliken & Co. v. Interface Flooring Systems (Canada) Inc. (1999), 83, C.P.R. (3rd) 470 (F.C.D.T.)
p. 49: Miliken at paras. 48-50: « Based on [s. 13(7) of the Copyright Act (which positively grants an interest in copyright when an exclusive licence] both authors and courts have argued that non-exclusive licences are not to be considered as granting an interest in the copyright » [on this issue, see also Robertson v. Thomson Corp. et al. [2002] at 186 and [2004] at 190-191]
Motel 6, Inc. v. No. 6 Motel Ltd. et al. (1982), 56 C.P.R. (2nd) 44 (F.C.T.D.)
P. 36-37
Murray v. Imperial Chemical Industries Ltd. (1967), 44 T.C.. 175 (C.A.).
P. 33: « According to a well established terminologie many authors distinguish between exclusive, sole and non-exclusive or bare licenses. [… as defined in Murray] »
Poolman v. Eiffel S.A. (1991), 35 C.P.R. (3rd) 384
p. 11: droits cinématographiques entre faillites et cessions. Droit civil du Québec invoqué.
Re: Erin Features #1 Ltd., [1991] 8 C.B.R. (3rd)
p. 16: Quote Gabor G.S. Takach & Ellen L. Hayes, « Case comment: Re: Erin Features #1 Ltd. » (1993) C.B.R. 66 at para 9: « a licence is simply a contractual agreement between the copyright owner and the licensee, under which the copyright owner agrees not to exert its rights against the licensee. »
p. 36: (at 206) MCM est une firme ayant obtenu sous licence l’exploitation exclusive des «marketing rights» d’Erin Features. Suite à la liquidation pour faillite de Erin Features, MCM demande à la cour de reconnaître son droit d’exploitation (et de l’opposer aux autres créanciers), obtenu avant la faillite. Puisqu’il s’agit d’une vente de droits, la transaction tient.
Re Song Corp. et al., [2001] 19, C.P.R. (4th) 235
P. 44
Ritchie v. Sawmill Creek Golf & Country Club Ltd., [2004] 35 C.P.R. (4th) 163
p. 34: Contrefaçon images site web autorisation d’utilisation verbale
p. 35: quote at paras 19 & 20 su art. 13(4) LDA
p. 49: (Richie at para 19): « Based on [s. 13(7) of the Copyright Act (which positively grants an interest in copyright when an exclusive licence] both authors and courts have argued that non-exclusive licences are not to be considered as granting an interest in the copyright » [on this issue, see also Robertson v. Thomson Corp. et al. [2002] at 186 and [2004] at 190-191]
Vaver, David, « The Exclusive License in Copyright » (1995) 9 I.P.J. 163 at 166
p. 42
Yen, Alfred C., « The Legacy of Fiest: Consequences of the Weak Connection between Copyright and the Economics of Public Goods », (1991) 52 Ohio St. L.J. 1343-1378 at 1365
p. 54