Bibliothèques Canada Commerce et Compagnies Droit d'auteur LLD Utilisation équitable
Analyse de contrats de licence
Olivier Charbonneau 2013-08-13
Savez-vous ce qui motive un père de deux jeunes enfants, propriétaire d’une vieille maison, employé à temps plein à se lancer dans des études doctorales ? Une intuition. Une simple, bête, intuition que la réalité telle qu’est est décrite et vécue dans notre Belle Province (et ailleurs) ne reflète pas la réalité objective, scientifique.
Le plus troublant est de constater que cette réalité-perçue est enchassée dans la Loi sur le droit d’auteur et les politiques culturelles. C’est pourquoi je me suis lancé dans une folle aventure qui dure depuis près de 10 ans : celle d’explorer l’interaction entre le droit d’auteur et les bibliothèques. J’ai dû me tourner vers des études en droit, pas de choix, c’est mon chantier.
Dans un côté : les bibliothèques, institutions anciennes et multiformes, dispersées mais coordonnées vers un but commun. De l’autre : le droit d’auteur, régime juridique d’interdiction général en lien avec le marché des biens de l’esprit et de la volonté des créateurs. Le tout dans un environnement en constante mutation où diverses autres animaux interagissent, entrent et sortent, émergent et meurent…
Et cette intuition, alors ? Simple. La doxa en cours veut que « plus » de droit d’auteur est absolument nécessaire à la survie de la culture. Un droit d’auteur plus long. Plus restrictif. Applicable à plus d’objets, de contextes et de personnes. Plus de contrôle. Plus de coûts. Plus… surtout suite aux mutations numériques.
Mais mon intuition appelle à revisiter cette doxa. L’expliquer, la conceptualiser, la déconstruire, la mesurer… susciter la réflexion et comprendre comment « plus » de droit d’auteur peut mener à « trop » et nuire à la culture.
Oui, oui, je sais. Je ne suis pas le seul à le dire. Heureusement, les cours Canadiennes, surtout la Cour suprême, semble piger l’astuce. Plusieurs chercheurs aussi. Mais mon message est simple: le droit d’auteur est important, primordial même, à défaut d’un mécanisme plus efficace dans nos économies capitalistes postmodernes…
Mais la question persiste en moi. Si le droit d’auteur doit exister à l’intérieur d’un équilibre entre les intérêts variés (créateurs-industrie-utilisateurs, ou le tango à trois, par exemple), où peut-on situer pivot?
Plus précisément, quelle est la frontière entre le recours aux exceptions (comme l’utilisation équitable ou les autres exceptions plus précises) et le recours aux dispositions contractuelles (les limitations via les sociétés de gestion collectives ou les concessions – licences et contrats – avec le titulaire) ? En plus, quel est le rôle des bibliothèques dans cette équation ? Comment appréhender cette conceptualisation dans un contexte de mutations numériques ?
Hé bien, bibi fait un doc par ce qu’il fait s’occuper quand son esprit tourne la nuit au lieu de dormir…
À priori, mon approche se situe en économie. Parce que ça prends un outil et celui de prédilection dans les arènes internationales (outre un recours véreux aux émotions, la peur et l’ignorance) dans notre ère repose dans les Dollars, les Euros et les Yens. Parce que les bibliothécaires sont majoritairement nuls en économie (sauf exception). Parce que j’aime ça l’économie. Et parce que j’ai l’impression que ça va marcher, mon truc..
Tiens, par exemple, en économie on étudie les transactions. On étudie autre chose aussi, mais leur truc c’est ça: les transactions. Alors, je pense aux transactions et comment un bibliothécaire moyen se réveille un matin et ce dit : « ce matin, je vais invoquer une exception au droit d’auteur pour utiliser une oeuvre protégée mais juste avant mon lunch. En après-midi, je vais avoir recours à une licence. » Un choix lourd pour le bibliothécaire moyen qui peut éventuellement avoir des incidences importantes pour les marchés si tous les bibliothécaires opèrent le même choix en même temps…
(Tiens, saviez-vous que les bibliothèques au Canada représentent un marché (« dépenses totales brutes » des gouvernements provinciaux et municipaux) de plus de 3 milliards de dollars Canadiens selon StatCan (p. 4)?)
Or donc, mon intuition découle d’une réflexion bien simple sur les transactions. Comme j’ai tenté d’expliqué lors du congrès de la Society for Economic Research on Copyright Issues (SERCI) , si le coût marginal de reproduction d’une oeuvre numérique est presque zéro, une bibliothèque opérant une politique découlant d’une exception au droit d’auteur ne pourra jamais concurrencer un titulaire légitime car les coûts d’exploitation ne sont pas de zéro. Puisque le coût dans un marché purement compétitif (où, par définition, coût marginal de production est égal au prix offert pour une commodité) sera toujours plus intéressant que le coût d’une politique en lien avec une exception, le bibliothécaire opérera le marché plutôt que la politique.
Si cette intuition s’avère vraie, un législateur aura intérêt à édicter une Loi sur le droit d’auteur aussi restrictive que voulue du moment que les bibliothèques disposent de suffisamment d’exceptions pour « contrôler » les marchés grâce aux recours aux exceptions.
C’est simple et imparfait, mais suffisamment pertinent pour mériter l’attention d’un doctorant…
Donc, je compte m’en sortir en explorant les clauses de contrat de licence signes par les bibliothèques universitaires Canadiennes afin de proposer un modèle d’un marché très particulier, celui de l’article scientifique revu par les pairs. En effet, je propose de m’attarder aux clauses contractuelles desdits licences d’accès signées entre les éditeurs scientifiques (et autres organisations) et les bibliothèques universitaires canadiennes.
Il existe certaines études pertinentes dans le domaine des licences d’accès en bibliothèques. Voici deux textes où ont participé Kristin R. Eschenfelder et Xiaohua Zhu :
– Kristin R. Eschenfelder, Tien-I Tsai, Xiaohua Zhu and Brenton Stewart. 2013 « How Institutionalized Are Model License Use Terms? An Analysis of E-Journal License Use Rights Clauses from 2000 to 2009 » College & Research Libraries vol. 74 no. 4 326-355
– Xiaohua Zhu and Kristin R. Eschenfelder 2010 « Social Construction of Authorized Users in the Digital Age » College & Research Libraries vol. 71 no. 6 548-568
Voir aussi le fascinent Big Deal Contract Project de Ted Bergstrom ainsi que son JournalPrices.com et Eignefactor.org.
Je souligne aussi le projet Terms of service Didn’t Read (tosdr) et les travaux de Lionel Maurel sur les métadonnées juridiques.
Finalement, voici une « brique » à lire absolument sur le sujet du droit des universités – je me demande s’il traite du droit d’auteur :
Call Number |
KE 3904 L35 1990 |
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Publisher |
Montréal, Québec : Editions Thémis, c1990 |
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Accès à l'information Canada Gouvernements
Guide pour l'accès à l'information en recherche
Olivier Charbonneau 2013-08-08
Je lève mon chapeau à mes collègues de la Freedom of Information and Privacy Association de la Colombie-Britannique. Ils nous livrent gratuitement un guide expliquant le processus de requête d’accès à l’information dans un contexte de recherche académique (ou autre).
Lancé sous licence Creative Commons, le document est accessible librement mais une contribution volontaire est demandée. Le titre du document est évocateur : Access and the Academy – Bringing ATI and FOI to academic research, dont voici le résumé :
Freedom of Information (FOI) and Access to Information (ATI) laws can be employed in any of these scenarios, and many more. Compared to the scope of the information that they collect and retain, the amount of data that is proactively made publicly available by government bodies
represents the tip of the proverbial iceberg. If you are looking to dig deeper and obtain records that are otherwise beyond reach, exercising your formal information rights under ATI/FOI laws can be an effective and rewarding method of inquiry.
The purpose of ths text is to provide readers with guidance on how to use ATI/FOI mechanisms as tools for academic research and inquiry. The text is geared toward students, academics, and others interested in employing the B.C. Freedom of Information and Protection of Privacy (FOIPP) Act and/or the Canadian Access to Information Act (ATIA), but most of the content of Access in the Academy is applicable to other Canadian access laws as well.
Over the following pages, you will find a description of the ATI/FOI process, instructions and tips for formulating and filing ATI/FOI requests, advice for troubleshooting requests-in-progress, and an overview of challenges, problems, and appeals processes.
Bibliothèques États-Unis Livre et édition LLD Universités
L'état des licences en bibliothèques universitaires
Olivier Charbonneau 2013-01-25
Dans la catégorie à lire sur les bibliothèques universitaires et le droit d’auteur aux USA, voici deux textes très intéressants sur les licences et la réserve électronique :
Karla L. Strieb and Julia C. Blixrud. “The State of Large-Publisher
Bundles in 2012.” Research Library Issues: A Bimonthly Report from ARL, CNI, and SPARC, no.
282 (Spring 2013). http://publications.arl.org/rli282/
Eschenfelder, Kristin R., Tien-I Tsai, Xiaohua Zhu and Brenton Stewart. « How Institutionalized are Model License Use Terns: An Analysis of E-Journal License Use Rights Clauses from 2000–2009. » College & Research Libraries [Pre-Print] http://crl.acrl.org/content/early/2012/04/16/crl-289.short
David R. Hansen, William M. Cross and Phillip M. Edwards. « Copyright Policy and Practice in Electronic Reserves among ARL Libraries » College & Research Libraries January 2013 vol. 74 no. 1 69-84 http://crl.acrl.org/content/74/1/69.short
Canada Droit d'auteur Écoles Utilisation équitable
1… 2… 3… Droit d'auteur pour l'éducation
Olivier Charbonneau 2012-12-10
Depuis la modernisation du droit d’auteur Canadien, plusieurs groupes ont émis des lignes directrices à leurs communautés. Le Conseil des ministres de l’Éducation (Canada) – qui n’inclut pas le Québec – vient de lancer la 3e édition de Le droit d’auteur… ça compte! Un fascicule de 24 pages expliquant le droit d’auteur.
Aussi d’intérêt, les lignes directrices de l’Association des Collèges et Universités du Canada, comme l’indique ce site de la York University. L’Université du Manitoba propose une autre version, mis à jour le 9 octobre 2012. J’ai mis ces textes dans la section « commentaires » de ce billet de Culturelibre.ca.
Celles-ci diffèrent de la politique de l’Université de Toronto, qui semble faire cavalier seul avec sa politique (et aussi, une des seules institutions au Canada qui détient une entente avec une société de gestion de la photocopie). D’ailleurs, la note d’Access Copyright sur ces politiques est d’intérêt.
D’intérêt aussi, ce « working paper » du Samuel Trosow et al. intitulé Objections to the Proposed Access Copyright Post-Secondary Tariff and its Progeny Licenses: A Working Paper.
Accès à l'information Écoles Enfant Malvoyant UNESCO
Les TIC pour les élèves handicapés
Olivier Charbonneau 2012-12-10
L’UNESCO annonce la diffusion d’un rapport intitulé : Des TIC accessibles et un apprentissage personnalisé pour les élèves handicapés : Un dialogue entre les éducateurs, l’industrie, les gouvernements et la société civile (64p, FR, PDF).
Ce document est issu d’une réunion tenue les 17 et 18 novembre 2011 au Siège social de l’UNESCO (Paris). Entre autres sujets, il y est question de l’interaction entre le droit fondamental à l’éducation et le droit d’auteur :
La pratique restrictive actuelle qui consiste à utiliser des matériels didactiques fondés sur le texte comme principal vecteur de l’enseignement fait obstacle à l’apprentissage personnalisé et à l’utilisation de formats différents lorsque cela est nécessaire. L’implication immédiate sur le plan des politiques est qu’il importe que les contenus. éducatifs soient, comme les ressources éducatives libres (REL), obtenus à des conditions d’utilisation souples, qui protègent les droits des auteurs tout en permettant la reproduction de l’œuvre sous une forme accessible à l’éventail le plus large possible d’élèves. [p.21]
Par ailleurs,
Lors des contrats d’achats passés avec des éditeurs pour des manuels et autres matériels d’enseignement, d’apprentissage et d’évaluation, il convient de prêter une attention particulière aux questions de droit d’auteur en ce qui concerne la conversion de ces matériels dans d’autres formats. [p.53]
Comme quoi le droit d’auteur, s’il est mal employé dans les relations privées entre les éditeurs (et leurs mandataires) ainsi que les instances publiques peut nuire aux élèves handicapés.
Accès libre Québec Universités
L'ACFAS sur la recherche pour le bien commun
Olivier Charbonneau 2012-12-06
L’ACFAS (association d’universitaires francophones du Canada dont je suis membre) publie un mémoire intitulé « Pistes pour une politique de la recherche et de l’innovation axée sur le bien commun » (PDF, 12p). L’objectif est de renseigner le processus d’élaboration de la Politique nationale de recherche et d’innovation du Ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de la technologie du Québec.
Je suis très heureux de voir figurer aux pages 4-5 le point suivant, sous les principes généraux d’une Politique :
2.1.5 Ouverture
Dans l’établissement de cette politique, le gouvernement devrait veiller à l’accessibilité des connaissances pour toutes les composantes de la société, y compris les organismes, les communautés, le milieu associatif et les citoyens.
Ce principe d’ouverture devrait amener le gouvernement à traiter de la question du libre accès, c’est-à-dire de la possibilité d’accéder gratuitement en ligne aux publications et autres productions intellectuelles issues de la recherche financée par des fonds publics.
De plus, le gouvernement devrait être attentif à la préservation de la liberté d’expression des chercheurs travaillant dans les ministères ou dont les travaux sont financés par les fonds publics. Dans ce sens, le gouvernement pourrait adopter une politique commune de communication au sein des différentes instances gouvernementales.
Ce travail découle de la réception de 65 mémoires issus de la communauté de l’ACFAS et d’une rencontre avec le ministère le 12 octobre dernier. Le mémoire représente la réflexion propre de l’ACFAS.