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Tension entre contrats et utilisation équitable
Olivier Charbonneau 2010-03-30
Une tension existe entre les contrats et l’utilisation équitable à la fois du point de vue institutionnel et commercial. Dans le premier cas, les revendications concernant l’articulation de l’utilisation équitable peuvent sembler signaler une volonté de porter préjudice au marché commercial d’une œuvre. Dans le second cas, l’imposition de limites à l’utilisation équitable par des contrats d’accès à l’information numérique pose un problème quant à la réalisation des missions institutionnelles ainsi qu’aux moyens de négociations offerts aux milieux patrimoniaux. Explorons brièvement chacun de ces points, afin de déterminer une conclusion (nous l’espérons) qui saura satisfaisante pour tous.
L’utilisation équitable et le marché
Certains pourraient prétendre que la lettre ouverte envoyée récemment au Ministre du patrimoine Canadien, l’honorable James Moore, vise à porter préjudice à l’exploitation commerciale des marchés. Cette interprétation n’est pas conforme avec l’objectif de l’utilisation équitable, telle que définie dans la lettre.
En fait, il est vrai que cette lettre demande une «ouverture» de la définition de l’utilisation équitable, à des fins qui ne sont pas uniquement énumérés dans la loi (actuellement, la Loi sur le droit d’auteur stipule cinq usages équitable: la recherche, l’étude privée, le compte rendu, la critique et la communication de nouvelles). Par contre, cette «ouverture» est nécessairement balisée et limitée par six facteurs d’analyse, tels qu’édictés à l’unanimité par les juges de Cour suprême du Canada dans l’arrêt CCH en 2004 :
(para 53 et suivants) (1) le but de l’utilisation; (2) la nature de l’utilisation; (3) l’ampleur de l’utilisation; (4) les solutions de rechange à l’utilisation; (5) la nature de l’œuvre; (6) l’effet de l’utilisation sur l’œuvre. Bien que ces facteurs ne soient pas pertinents dans tous les cas, ils offrent un cadre d’analyse utile pour statuer sur le caractère équitable d’une utilisation dans des affaires ultérieures.
Donc, présenter la position présentée dans la lettre comme une «ouverture» de l’utilisation équitable porte préjudice à la subtilité de la position. Cette «ouverture» est immédiatement «fermée» par des balises et des contraintes assez lourdes. Il est essentiel (à nos yeux) de demander à la fois ladite «ouverture» et de s’imposer des «balises» corrélatives, qui «ferment» la boucle, afin d’assurer l’équité dans le régime du droit d’auteur.
Paradoxalement, il est important de préciser que l’utilisation équitable se porte au profit des créateurs avant tout ! Par exemple, la parodie n’est pas couverte actuellement en droit canadien, l’approche «ouverture/balise» offre un mécanisme juridique simple pour régler ce silence de la loi.
Par ailleurs, il est primordial de comprendre que tous les créateurs sont avant tout des consommateurs, tandis que l’inverse n’est pas nécessairement vrai. Une auteure lit, un cinéaste regarde et une musicienne écoute avant de créer. La culture nourrit la culture. L’utilisation équitable est un moyen de préparer des nouvelles recettes, sans tomber dans les plats. L’utilisation équitable sert les créateurs.
L’utilisation est donc un moyen nécessaire pour la flexibilité de la loi et la lettre propose une approche en lien avec l’équité et la balance des intérêts. En plus, elle sert la création. Le milieu commercial doit au moins apprécier cet argument, qui sera à leur bénéfice par ailleurs.
Contrats d’accès numériques et utilisation équitable
Avant l’arrivée de l’environnement numérique, l’utilisation de matériel protéger par le droit d’auteur s’opérait (et s’opère toujours en fait) dans un cadre extra-contractuel. Quand j’achète et je lis un roman (sur papier), le seul contrat auquel je participe est le contrat de vente avec le libraire. Il n’y a pas de transfert ou de licences sur les droits d’auteurs. C’est pourquoi la doctrine de la première vente fut édictée par le milieu, elle précise qu’une présomption d’avoir les droits nécessaires pour utiliser raisonnablement le livre (pour le revendre, le donner, le détruire…) existe au profit de l’acquéreur légitime.
Dans le monde numérique, tout accès se base sur un contrat. Le fait de lire ces ligne sur CultureLibre.ca, vous êtes assujettis au contrat d’utilisation Creative Commons, que vous soyez d’accord ou non. La tendance lourde de l’industrie consiste à proposer des contrats d’utilisation pour toutes les formes d’accès à l’information numérique. La règle d’utilisation devient donc fragmentée.
Il s’agit d’une réalité de l’environnement numérique, qui est ni bonne, ni mauvaise. Cet analyse dépend de votre point de vue (on pourrait dire que le papier est un vecteur de la Culture Libre car il existe encore une présomption d’utilisation ouverte… mais ça, c’est un sujet pour autre billet). Le point est que nous devons maintenant composer avec cette réalité.
Une question qui nous tracasse depuis que nous comprenons la distinction en droit civil entre un droit d’ordre public (un article de la loi qui ne peut être ignoré) et un droit supplétif de volonté (un article de loi qui peut être neutralisé par un contrat). Est-ce que l’utilisation équitable constitue un droit dit d’ordre public? (en fait, il n’est pas certain que cette question s’applique à une loi fédérale à cause des caractéristiques de la common law de cet ordre judiciaire – mais la question théorique demeure).
Un titulaire pourrait être tenté d’éliminer tout risque de recours à l’utilisation équitable par un utilisateur de contenu en articulant des dispositions contractuelles en ce sens. Dans un contrat d’adhésion (sans négociation possible, comme dans presque tous les contrats d’utilisation où nous devons donner notre consentement sans même comprendre les contrats), cette approche constitue une utilisation inacceptable du droit exclusif réservé au titulaire et élèverait sa position de monopole économique au delà de l’équité. Il est important de ne pas contraindre l’utilisation équitable par les contrats.
Quelle est donc la solution ? Dans la plupart des cas, un contrat d’accès permet à un utilisateur de bénéficier de certains droits limités sur une œuvre protégée. Donc, le titulaire offre une licence à l’utilisateur pour certains de ses droits exclusifs. En ce sens, un contrat d’utilisation bien formulé n’a pas besoin de toucher à l’utilisation équitable car l’utilisation équitable constitue une utilisation moindre que le contrat d’accès lui-même (cette hypothèse est à valider, mais la logique/rhétorique semble tenir à première vue).
Prenons un exemple: un contrat d’accès à un corpus numérique signé entre une université et un éditeur donné. Ce contrat permet la copie du corpus pour des fins de distribution multiple aux étudiants du cours (via un site d’enseignement comme Moodle). Il permet également aux membres de la communauté universitaire d’effectuer des recherches et de s’envoyer des copies entre eux, tout en effectuant des copies pour des fins d’utilisation personnelles…
Le point est que la plupart des usages permis dans cet exemple vont au delà de l’utilisation équitable. Ces usages sont offerts contre rémunération par l’institution. Le contrat est négocié et les termes sont équitables. Si jamais une partie considère que certains usages sont inéquitables, il convient de les baliser dans le contrat afin d’offrir une rémunération. L’utilisation équitable devrait toujours être permise dans ces contextes, car les droit d’accès et d’utilisation du contrat sont toujours supérieurs aux droits conférés par l’utilisation équitable (hypothèse).
Conclusion: concevoir de bons contrats !
Donc, de bons contrats d’accès, négociés avec diligence et respect des impératifs de chacun (économiques ou institutionnels) est la meilleure solution pour tous. Il est donc primordial d’entamer des négociations en ce sens, pour assurer de réguler les marchés de biens protégés par le droit d’auteur d’une manière équitable.
Conférence Contenu culturel Internet Montréal
Conférence: démocratisation du droit d'auteur?
Olivier Charbonneau 2010-03-24
Ce vendredi 26 mars à 12h30 aura lieu une conférence de professeure Ysole Gendreau (Université de Montréal), ayant comme thème «L’Internet démocratise-t-il le droit d’auteur? Réflexions sur la participation populaire». Cette formation est créditée par le Barreau du Québec (1,50 heures).
L’accès est libre (inscription non requise) et la conférence aura lieu à la salle 202 au 3644 rue Peel. Voici la description, selon le site du Centre des politiques en propriété intellectuelle, organisateur de l’événement :
L’Internet permet à tout un chacun d’exprimer son opinion sur l’actualité et de la faire connaître directement à ceux qui sont à l’écoute de l’opinion publique. De plus en plus, d’ailleurs, les décideurs en matière de droit d’auteur invitent le public à participer à un tel exercice. Comment ce phénomène se manifeste-t-il en droit d’auteur canadien?
Nous y seront sans faute !
Bibliothécaire Droit d'auteur Rapport et étude
Le droit d'auteur pour les bibliothécaires
Olivier Charbonneau 2010-03-24
Le Berkman Center de la Faculté de droit de l’Université Harvard, en collaboration avec eIFL (Electronic Information for Libraries), publie sur Internet un guide sur le droit d’auteur à l’attention des bibliothécaires.
Selon le communiqué annonçant le lancement,
“Copyright law directly affects library services providing access to learning resources, scientific and research information,” said Rima Kupryte, Director eIFL.net. “Everyday librarians are managing information and responding to requests from students, academics, and members of the public. They are well placed to provide practical advice on topical copyright-related issues. This curriculum, which includes modules on the scope of copyright law, exceptions and limitations and managing rights, provides librarians from around the world with an opportunity to understand this important area of law.”
“Librarians and their professional organisations play key roles in shaping national and international copyright policy and in protecting and promoting access to knowledge,” said William Fisher, faculty director of the Berkman Center for Internet & Society, “eIFL.net has created a crucial network of librarians in developing and transition countries. It is essential that the members of that network have the fullest possible understanding, not just of the current copyright laws, but also of the ways in which those laws could and should be interpreted and modified in the future. We hope that this curriculum will help to advance that understanding.”
“Maximising access to educational and learning materials is critical for development in Africa”, said Benson Njobvu, University of Zambia. “Teaching students about legal information issues enhances the role of the librarian, preparing the next generation for a professional career in the digital age. We aim to produce librarians who will become well-informed advocates for access to knowledge. “Copyright for Librarians” is a valuable new resource that will help us to achieve our goal”.
Il s’agit d’un réel curriculum diffusé par Internet sous licence Creative Commons. Tous et chacun peuvent l’utiliser et le rediffuser, voire le traduire, pour le bénéfice de tous ! Bravo aux instigateurs de ce projet du Berkman Center et d’eIFL !
Contenu culturel Montréal Patrimoine
Le Centre canadien de l'architecture recrute
Olivier Charbonneau 2010-03-23
Une collègue nous a demandé de diffuser une offre d’emploi pour un «Agent principal des droits d’auteur» – Voir la description ci-bas.
Nous n’avons pas d’information supplémentaire à fournir. Si vous êtes intéressé, veuillez contacter le CCA directement au rh@cca.qc.ca.
DESCRIPTION D’EMPLOI
Identification de l’emploi
Titre de l’emploi : Agent principal des droits d’auteur
Division : Collection
Supérieur immédiat : Chef, Services à la Collection et aux Programmes
Statut : Permanent à temps complet (35hrs/semaine)
Période d’affichage : Du 22 mars au 12 avril 2010
Entrée en poste : Mai 2010
Sommaire de l’emploi
L’agent principal des droits d’auteur fournit l’orientation et fait des recommandations sur les questions de droit d’auteur, prend l’initiative dans le développement de la politique des droits d’auteur et élabore la stratégie. Le titulaire travaille en étroite collaboration avec tous les services pour les projets de l’institution impliquant des droits d’auteur. Il gère aussi les demandes de reproduction et en assure la conformité.
Principales responsabilités de l’emploi
Politique
· Gérer la stratégie institutionnelle de droits d’auteur
· Apporter une vision stratégique et une direction curatoriale aux questions et aux besoins liés aux droits d’auteur institutionnels
· Développer et implanter une politique institutionnelle de droits d’auteur, ainsi que des guides et procédures Maintenir des connaissances à jour et comprendre les lois canadiennes et internationales dans le domaine des droits d’auteur, des licences, de la protection de la vie privée, etc.
· Assurer la conformité des droits d’auteur lors de l’utilisation des images de la Collection
· Fournir la formation et conseiller au besoin les membres du personnel
Licences et contrats
· Développer une stratégie pour l’ensemble de l’institution, faire des recherches sur les droits d’auteur et en négocier l’affranchissement pour les publications, expositions, site web et autres initiatives digitales, éditions et matériels promotionnels
· Réviser les demandes de reproductions où il est question de droits d’auteur, acquitter les droits selon les règles et aviser les clients sur les exigences des droits d’auteur
· Gérer les licences et ententes de droits d’auteurs, incluant le développement et la rédaction de licences pour l’utilisation des images de la Collection et de tiers, les autorisations et les ententes pour l’utilisation des histoires orales et les présentations et examiner et réviser les ententes de licences de tiers pour l’utilisation d’images, films et autres matériels
· Gérer, développer et rédiger les licences et les ententes de cessions de droits pour les commandes de textes cédés et licences de textes imprimés
· Conseiller sur les problèmes de droits d’auteur liés aux acquisitions, prêts, expositions, publications et site web et participer à la rédaction des contrats qui y sont associés
· Conseiller et participer à la rédaction des autres contrats et documents institutionnels pour les clauses sur les droits d’auteur
· Superviser les membres du personnel contractuels impliqués dans la recherche et l’affranchissement des droits d’auteur
Demandes de reproductions
· Gérer les demandes de reproductions et assurer l’efficacité du travail et des résultats
· Accomplir toutes autres tâches connexes lorsque requis
Qualifications requises pour l’emploi
· Niveau de scolarité : Diplôme d’études supérieures en administration commerciale, droit, bibliothéconomie ou une combinaison de scolarité et expérience équivalente dans le domaine des droits d’auteur
· Nombre d’année d’expérience pertinente de travail requis : 5 à 7 ans
· Maîtrise du français et de l’anglais, parlés et écrits, capacité à rédiger et à réviser des documents
· Démontrer la connaissance d’expérience acquise de la loi sur les droits d’auteur, les marchés de licences et les droits de reproductions canadien et internationaux, les principes généraux et pratiques en muséologie, la forme actuelle et historique des documents, et les limitations quant à la sauvegarde et la reproduction de documents
· Expérience en droit, un atout
· Connaissance et compétence en production et négociation de contrats
· Jugement éditorial démontré avec engagement d’efficacité et de qualité
· Excellent sens de l’organisation, gestion de projets, communication et relations interpersonnelles
Si ce poste vous intéresse, veuillez faire parvenir votre candidature à l’attention du Service des Ressources humaines.