Bibliothèques Citoyen Musique Numérisation Préservation Questions Lecteurs Universités Utilisation équitable
Vinyles numériques
Olivier Charbonneau 2006-12-09
Voici une question d’un collègue travaillant dans un établissement d’enseignement :
Je suis responsable d’une collection exhaustive de vinyles que j’aimerais digitaliser (sic). Une fois de plus, la même question se pose: Y a-t-il lieu de s’inquiéter d’un tel usage ? Si oui, qu’elles alternatives s’ouvrent à moi ?
Tel que discuté, voici mes opinions personnelles concernant ces usages. Il est important de noter que je ne suis pas avocat et que je diffuse mes commentaires pour des fins de discussion uniquement.
Le droit d’auteur est un régime statutaire qui confère un monopole à un créateur d’une oeuvre originale et fixée sur un support. Ce monopole peut être cédé à un tiers, comme un label de musique pour des fins de vente commerciale.
Beaucoup d’usages (reproduction, adaptation, prestation devant public, diffusion par télécommunication, etc.) d’une oeuvre sont interdits, sauf si (1) elle s’opère dans le cadre de l’utilisation équitable; (2) si une exception prévue rend licite l’usage ou (3) si le créateur, ou plus précisément, si l’ayant droit (celui qui « possède » le droit d’auteur qui n?est pas le créateur) consent à l’usage en question.
Or donc, la numérisation – digital n’existe pas en français, à moins de parler de ses doigts 😉 – est considéré comme une reproduction. Le régime de l’utilisation équitable, définit aux articles 29 et suivant, considère qu’UNE SEULE copie peut être faite pour ses besoins PERSONNELS de recherche, d’étude, de compte rendu, de critique ou de communication de nouvelles (certaines conditions s’appliquent). Donc, le régime de l’utilisation équitable ne semble pas s’appliquer (pour le moment) à ce que tu proposes.
Ensuite, plusieurs exceptions spécifiques sont édictées dans la loi après celle de l’utilisation équitable (qui est considérée comme l’exception « générale »). Il y en a plusieurs, regardons-en deux en particulier.
La première concerne l’article 30.1, pour édicter les règles de gestion et conservation de collections. Elle s’applique uniquement aux bibliothèques ou aux employés de bibliothèques, sous des conditions très précises. Peut-être serait-il possible de reconnaître ton service comme tel, mais là, c’est hors de mon contrôle. Constate également que si une alternative commerciale existe qui répondrait aux besoins de la numérisation (une version MP3 sur Itunes, par exemple) la conversion de format ne peut PAS s’opérer. Encore ici, il faudrait s’asseoir ensemble et de discuter de tous les détails de la chose.
Ensuite, il y a le régime du premier paragraphe de l’article 30.2, concernant les gestes posés pour des usagers de bibliothèques, celui même qui fut testé par des éditeurs juridiques, dont CCH, dans l’action en justice contre le Grande bibliothèque du barreau de l’Ontario. Encore dans ce cas-ci, il faudrait discuter de ton cas en profondeur, surtout avec la théorie de l’oignon en tête.
Bibliothèque nationale Citoyen Droits des citoyens États-Unis Fair use GDN (DRM) Liberté d'expression LOC MPT (TPM) Numérisation Réforme
6 nouvelles exceptions au DMCA
Olivier Charbonneau 2006-11-24
Mark Perkins nous informe que le Copyright Office de la Library of Congress vient d’édicter 6 nouvelles exceptions à la fameuse Digital Millennium Copyright Act ou DMCA (USA).
Pour les 3 prochaines années, les 6 exceptions permettent de contourner des clé électroniques (17 U.S.C. § 1201(a)(1)) dans les situation suivantes (tiré d’un communiqué de la Electronic Frontier Foundation.) :
1. Audiovisual works included in the educational library of a college or university’s film or media studies department, when circumvention is accomplished for the purpose of making compilations of portions of those works for educational use in the classroom by media studies or film professors.
2. Computer programs and video games distributed in formats that have become obsolete and that require the original media or hardware as a condition of access, when circumvention is accomplished for the purpose of preservation or archival reproduction of published digital works by a library or archive. A format shall be considered obsolete if the machine or system necessary to render perceptible a work stored in that format is no longer manufactured or is no longer reasonably available in the commercial marketplace.
3. Computer programs protected by dongles that prevent access due to malfunction or damage and which are obsolete. A dongle shall be considered obsolete if it is no longer manufactured or if a replacement or repair is no longer reasonably available in the commercial marketplace.
4. Literary works distributed in ebook format when all existing ebook editions of the work (including digital text editions made available by authorized entities) contain access controls that prevent the enabling either of the book’s read-aloud function or of screen readers that render the text into a specialized format.
5. Computer programs in the form of firmware that enable wireless telephone handsets to connect to a wireless telephone communication network, when circumvention is accomplished for the sole purpose of lawfully connecting to a wireless telephone communication network.
6. Sound recordings, and audiovisual works associated with those sound recordings, distributed in compact disc format and protected by technological protection measures that control access to lawfully purchased works and create or exploit security flaws or vulnerabilities that compromise the security of personal computers, when circumvention is accomplished solely for the purpose of good faith testing, investigating, or correcting such security flaws or vulnerabilities.
Pourquoi y a-t-il de nouvelles exceptions sans que la loi du Copyright aux USA ne soit modifiée, demandez-vous ? Excellente question. Suite au DMCA, le Copyright Office de la Library of Congress, ou LOC pour les intimes, s’est vue chargée d’un rôle de médiateur des besoins de la communauté en matière d’exceptions au droit d’auteur.
À tous les 3 ans, la Copyright Office lance un appel pour savoir s’il y a des besoins spéciaux de la communauté, selon les nouvelles technologies ou les usages de celles-ci. Le panel évalue les soumissions et édicte de nouvelles règles de droit, en vigueur jusqu’à la prochaine « saison des exceptions » 3 ans plus tard. Ce mécanisme fut créé en réaction des peurs de la communauté des usagers en lien avec les mesures de protection technologique (technological protection measures ou TPM) et les usages des technologies. Il s’agit d’une structure novatrice dans le monde de l’administration du droit d’auteur.
Le lecteur averti aura compris que le Copyright est sous l’égide de la Library of Congress au USA. En effet, la bibliothèque des parlementaires des USA est un « département » de la branche législative du gouvernement, et détient des pouvoirs spéciaux, dont nos institutions documentaires nationales n’ont pas au Canada. La bibliothèque du Parlement canadien n’est qu’une simple (quoique splandide) institution, tout comme Bibliothèque et Archives Canada.
Bibliothécaire France Information et savoirs Internet Journaliste Rapport et étude Utilisation équitable
Le droit et la presse
Olivier Charbonneau 2006-11-11
L’Association des professionnels de l’Information et de la Documentation (ADBS) annonce la publication d’un nouveau livre :
Le panorama de presse : aspects juridiques, Michèle Battisti
Coll. L’essentiel sur… (ISSN 1773-729X), ADBS Editions, 2006
64 pages – ISBN 2-84365-084-4 / 978-2-84365-084-0
Prix de vente : 15,00 € TTC
Selon le communiqué de presse, l’auteure Michèle Battisti assure depuis 1998 une veille juridique auprès de l’Association des professionnels de l’information et de la documentation (ADBS). Elle publie, chaque mois, une lettre juridique électronique intitulée «Actualités du droit de l’information». Par ailleurs, voici le descriptif du livre :
Le traitement de la presse, une réponse à des besoins d’information
Les entreprises et les administrations ont éprouvé depuis longtemps le besoin de reprendre les informations d’actualité relatives à leur secteur d’activité et à leur environnement. A cet effet, elles ont créé des revues de presse. S’il est probable que les évolutions techniques feront évoluer la forme de ce produit documentaire, l’accès à l’information de presse restera un besoin fort.
Des débats juridiques autour de la revue de presse sur support papier
Les aspects juridiques de la revue de presse avaient donné lieu à de vifs débats lors de l’adoption de la loi relative à la gestion collective du droit de reproduction par reprographie, le 3 janvier 1995. Baptisé « panorama de presse » pour le dissocier du produit réalisé par les journalistes, les polémiques n’en ont pas moins perduré au cours des années qui ont suivi.
… et des sources d’incertitude sur le support numérique
Il semblait aussi nécessaire de faire le point sur le traitement juridique de ce produit au moment de l’adoption en France de la loi sur les droits d’auteur et les droits voisins dans la société de l’information (DADVSI). La revue de presse suscite encore, en effet, de nombreuses interrogations, notamment dans l’environnement électronique.
ADBS – L’Association des professionnels de l’Information et de la Documentation
25, rue Claude Tillier, 75012 – PARIS adbs@adbs.fr
Tél: 01 43 72 25 25 – Télécopie: 01 43 72 30 41
Accès libre BAnQ Bibliothèque nationale Diversité culturelle Document numérique Internet Liberté d'expression Revendication Utilisation équitable
Pour le référencement libre !
Olivier Charbonneau 2006-11-08
Bibliothèques et Archives nationales du Québec nous honore, tout en causant un inconfort à CultureLibre.ca. Il appert que notre humble carnet est dans la mire des concepteurs de l’extranet de l’institution phare de la bibliothéconomie québécoise. Merci d’ailleurs de votre considération !
Par contre, car l’histoire n’est pas si simple, nous avons reçu une demande d’autorisation avant de procéder au référencement. Vous avez bien lu: il semble que les fonctionnaires nationaux du livre, sous prétexte de vouloir protéger nos « droits de propriété intellectuels » procèdent à une demande d’autorisation avant de lier vers TOUS les sites de l’extranet.
Assoiffés de détails, nous nous empressons de confirmer ce soupçon directement auprès de l’institution (avec un brin d’incrédulité, ajoutons). Or donc, on nous cite une certaine Politique administrative visant le respect du droit d’auteur au sein de Bibliothèques et Archives nationales du Québec pour justifier ces vérifications. Le comité chargé de l’extranet aurait décidé de l’appliquer en confirmant l’autorisation avant de créer chaque lien.
Lorsque nous demandons une copie de cette fabuleuse politique, on nous informe que seules les institutions dûment enregistrées peuvent accéder à l’extranet, où est consignée le document. Mais ce déni d’accès ne peut arrêter un bibliothécaire futé… surtout quand la Commission sur l’accès à l’information est là pour prêter main forte.
Ceci dit, notre réseau informel a facilité l’accès audit document sans avoir à lancer la requête en accès. Cette livraison s’est effectuée dans le cadre de nos recherches et études privées. Il va sans dire que nous ne sommes pas impressionnés, voire même déçus. On repassera côté diffusion diligente de l’information 🙁
Suite à la lecture de cette politique, fort intéressante d’ailleurs, on constate la maîtrise des concepts du droit d’auteur par les intervenants de BAnQ. La toute fin présente la partie touchant les drtoits numériques :
Partie XI – Dispositions particulières visant les oeuvres protégées par un droit d’auteur dans les réseaux électroniques ou les autoroutes de l’information
L’article 26.2 (p. 21) semble particulièrement intéressant…
Mais horreur : il est impossible de faire des copiers-collers du document PDF, ces fonctions requièrent un mot de passe. Impossible donc d’exercer notre droit à l’exception au droit d’auteur pour critique et compte rendu ou encore pour communication de nouvelles ! Encore unediffusion diligente de l’information ratée 🙁
Tant pis, allons-y pour la bonne vieille copie manu militari… voici l’article 26.2 de ladite politique :
26.2 La reproduction sous quelque forme que ce soit, la publication, l’adaptation, la traduction, la représentation en public et la communication par télécommunication au public d’oeuvres ou de parties d’oeuvres, dont le droit d’auteur encore existant n’appartient pas au propriétaire ou producteur du site ou des contenus accessibles, requièrent l’autorisation préalable du titulaire du droit d’auteur, comme s’il s’agissait de toute autre forme de reproduction dans un livre, un manuel, un film ou un enregistrement sonore ; cela vaut quelle que soit la fin recherchée, diffusion commerciale ou gratuite.
Cet article semble simplement articuler les usages à retenir quant à la reproduction d’oeuvres numériques. Rien pour justifier une requête en autorisation de référencement.
Dans ce cas ci, peut-être que l’article que l’article 28.2 de la Loi sur le droit d’auteur, peut nous éclairer puisqu’il stipule les droits moraux de l’artiste. Or donc, constitue une violation du droit moral de l’artiste si son oeuvre est « utilisée en liaison avec un produit, une cause, un service ou une institution ». Peut être que BAnQ devrait relire l’article in fine, qui stipule que
« pour l’application du présent article, ne constitue pas nécessairement une déformation, mutilation ou autre modification de l’oeuvremesure de restauration ou de conservation prise de bonne foi »
Pour les curieux, voici le texte de l’article 28.2 (Violation des droits moraux, Droit d’auteur, Loi sur le, [L.R., 1985, ch. C-42]), offert dans les deux langues officielles du Canada grâce au merveilleux site CanLii – IIJCan :
Loi sur le
PARTIE III : VIOLATION DU DROIT D’AUTEUR ET DES DROITS MORAUX, ET CAS D’EXCEPTION
Violation du droit d’auteur
Violation des droits moraux
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28.2 (1) Il n’y a violation du droit à l’intégrité que si l’oeuvre est, d’une manière préjudiciable à l’honneur ou à la réputation de l’auteur, déformée, mutilée ou autrement modifiée, ou utilisée en liaison avec un produit, une cause, un service ou une institution.
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(2) Toute déformation, mutilation ou autre modification d’une peinture, d’une sculpture ou d’une gravure est réputée préjudiciable au sens du paragraphe (1).
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(3) Pour l’application du présent article, ne constitue pas nécessairement une déformation, mutilation ou autre modification de l’oeuvre un changement de lieu, du cadre de son exposition ou de la structure qui la contient ou toute mesure de restauration ou de conservation prise de bonne foi.
L.R. (1985), ch. 10 (4e suppl.), art. 6.
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Copyright Act
PART III: INFRINGEMENT OF COPYRIGHT AND MORAL RIGHTS AND EXCEPTIONS TO INFRINGEMENT
Moral Rights Infringement
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28.2 (1) The author’s right to the integrity of a work is infringed only if the work is, to the prejudice of the honour or reputation of the author,
(a) distorted, mutilated or otherwise modified; or
(b) used in association with a product, service, cause or institution.
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(2) In the case of a painting, sculpture or engraving, the prejudice referred to in subsection (1) shall be deemed to have occurred as a result of any distortion, mutilation or other modification of the work.
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When work not distorted, etc.
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(3) For the purposes of this section,
(a) a change in the location of a work, the physical means by which a work is exposed or the physical structure containing a work, or
(b) steps taken in good faith to restore or preserve the work
shall not, by that act alone, constitute a distortion, mutilation or other modification of the work.
R.S., 1985, c. 10 (4th Supp.), s. 6.
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Constatez le rôle de la bonne foi en rapport avec les efforts de « restauration ou de conservation » de l’oeuvre par une institution. Sans vouloir tomber dans de la fiction juridique, peut-être qu’il y a un lien à faire, mutatis mutandis, entre l’effort de « restauration ou de conservation » d’une oeuvre physique et le référencement vers un site web (surtout si les usages biens connus du Web corroborent cette perspective) ?
D’ailleurs, les juristes chevronnés (ou rêveurs) pourront même explorer les possibilités d’invoquer l’immunité administrative des bibliothèques, grâce à leur missions de préservation et d’accès, dont elles ont la charge par le gouvernement (pour ne pas dire la Reine), afin de lier sans gêne…
Comble de l’ironie, BAnQ auraient pu rediffuser le contenu ENTIER de CultureLibre.ca (et pas simplement lier vers notre site) sans demander notre consentement, grâce à notre licence Creative Commons.
Pour tout dire, la politique est éclairée et intelligente, mais il semble que son l’application soit beaucoup trop stricte. N’hésitez JAMAIS à créer des liens vers des sites web et ce, sans autorisation. Vraiment, si c’est ça la bibliothéconomie québécoise du 21e siècle, on est pas sorti du bois.
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P.S.:
Souvenez-vous de notre ami Captain Copyright ? La lettre écrite par la Canadian Library Association dénonçant l’initiative malheureuse d’Access Copyright, le groupe national anglophone de bibliothécaires précisait ceci en ce qui concerne les politiques restrictives de référencement dans Internet :
CLA is equally concerned about the terms of use of the Captain Copyright website, which shamefully purport to restrict linking to the site, stating “permission to link is explicitly withheld from any website the contents of which may, in the opinion of Access Copyright, be damaging or cause harm to the reputation of Access Copyright.” CLA believes that this poses a threat to our shared information commons, as it attempts to create a new category of rights that will unduly restrict public discourse and freedom of expression on the free web.
(nous soulignons). Peut-être serait-il pertinent de lancer une réflexion étendue sur la question du référencement équitable ? (quoi que la question semble triviale pour nous…)