Bibliothèques Canada Droits des citoyens Information et savoirs Revendication
Contre un régime de pauvreté intellectuelle
Olivier Charbonneau 2006-11-17
Suite au texte publié dans Le Devoir ce 17 novembre 2006 par des membres du comité du droit d’auteur de l’ANEL, voici un texte préparé par Olivier Charbonneau, Bibliothécaire professionnel et chercheur, Université Concordia, Candidat à la maîtrise en droit des technologies de l’information, Université de Montréal et membre du Comité du droit d’auteur de l’ASTED
Quel doux châtiment imposé à Sisyphe, au moins il n’est pas condamné à être bibliothécaire intéressé au droit d’auteur numérique. Non seulement la rationalité en faveur des droits des citoyens en rapport au droit d’auteur est absente dans ce coin de pays mais, l’industrie culturelle domine l’arène publique à un point tel que je suis convaincu d’écrire ces lignes au détriment de ma carrière. Mais l’enjeux est crucial : un Internet francophone fort et en foisonnement. Sujet épineux par excellence, le travail de médiation est colossal et il va sans dire que la répétition est académique.
Nos voisins du sud bénéficient, entre autres, de l’Electronic Frontier Foundation, l’American Civil Liberties Union, la Alliance For Taxpayer Access pour entretenir le débat. En plus, les dispositions en faveur des usagers du Copyright, le fameux fair use, sont beaucoup plus étendues que notre équivalent canadien, l’utilisation équitable. Alors, comment expliquer que le nombre de titres édités aux USA a explosé de 25% et les dépenses des consommateurs pour les livres, revues et papeterie ont également augmenté de 15%, de 2000 à 2005 selon Euromonitor International? Ces chiffres n‘évoquent-ils pas une vision éclairée quant à la politique du droit d’auteur?
La thèse des droits des usagers est simple et raisonnable et je suis surpris du haro de mes collègues de l’ANEL. Le droit d’auteur constitue une nécessité absolue, là n’est pas la question. Une compensation juste et raisonnable doit accompagner le créateur dans son entreprise artistique. Ceci dit, il est important de nuancer le droit d’auteur à la lumière du droit à la liberté d’expression, du droit à l’accès à l’information, du droit à la vie privée ainsi que le droit à une éducation abordable et de qualité. Le droit d’auteur nourrit la flamme culturelle, certe, mais une surprotection au détriment des usages, surtout dans le monde numérique, risque d’étouffer la création.
L’eldorado numérique
Évoquant les problèmes des pourriels, la plus récente parution de la revue Wired constatait la fin de l’époque «far west» du Web et la transition vers un Chicago des années 1930. Loin de vouloir évoquer le gangstérisme dans ce débat naissant, plusieurs exemples pointent vers la cristallisation des positions ainsi que vers des abus des deux côtés de l’équation. Autant que la pratique d’échanger de la musique dans Internet pose un sérieux problème à l’industrie, autant l’imposition de mesures de protection technologiques («technological protection measures» ou TPM) par l’industrie contrecarre les droits des usagers à transférer le support du CD à leur baladeur numérique ou à la copie privée. Le cas de l’éducation suit dans la même veine.
Le contexte historique de l’exception pédagogique évoquée par mes collègues de l’ANEL découle directement du rapport de 2004 du Comité permanent du patrimoine canadien. Ce dernier proposait des pistes à suivre pour plusieurs problématiques, dont l’utilisation par les écoles du pays des contenus accessibles publiquement dans Internet. Or, ce document recommande l’imposition d’une sorte de taxe d’accès à Internet pour nos écoles, sur tout contenu dans le réseau des réseaux (si aucune mention expresse n’est faite que cet usage est permit).
Vous avez bien lu. En dépit de la volonté du créateur d’employer les technologies du Web pour diffuser librement le fruit de son travail, les écoles devraient payer pour les clics des élèves. Pis encore, aucune mention n’est faite de comment cette taxe sera calculée ni comment elle sera redistribuée. Il est donc simple de comprendre les efforts du Conseil des ministres de l’éducation, Canada, dans ce dossier ainsi que la levée de boucliers à travers du pays, en faveur d’un Internet libre et fort.
Un Internet libre ne veut pas dire un Internet libre de droits. Par contre, il faut reconnaître que certains usages sont triviaux et qu’ils ne méritent pas l’attention industrielle que vous préconisez. Par exemple, imaginez la petite Marie qui trouve une photo d’une lofteuse dans un site Internet et qu’elle effectue un copier-coller pour l’inclure dans un rapport de français remis en classe. Combien devrait-elle payer pour cet usage (faut-il payer)? Et à qui exactement : à la lofteuse en question, au photographe, à l’empire médiatique ou plutôt, au diffuseur? Pis encore, qu’arrive-t-il si la jeune Marie l’affiche dans son blogue, en indiquant un lien vers l’origine ? Notez que nos voisins du sud ne se posent pas ces questions en lien avec les gestes posés par little Mary dans le cadre de son éducation ou de l’usage du Web.
Réforme
Le processus de réforme à saveur canadienne a débuté suite aux fameux traités de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) signés en 1996. La réponse canadienne fut d’imposer une sorte de moratoire sur l’utilisation d’Internet par nos institutions afin de débattre de la question. Depuis une dizaine d’années, les établissements d’enseignements, les bibliothèques, les musées, les archives et autres institutions marchent sur des œufs et emploient timidement les potentiels d’Internet, en attendant Godot. C’est l’appropriation citoyenne des potentiels d’Internet qui en souffre directement.
En tant que signataire des traités de l’OMPI, nous sommes tenus d’en incorporer les points de droit dans notre Loi sur le droit d’auteur. Par contre, c’est avec un comble d’ironie que vous tissez un lien entre l’environnement et le droit d’auteur. Dans ce cas précis, permettez-moi de vous rappeler que le Canada a signé ET ratifié le protocole de Kyoto, nous imposant une obligation de résultat en matière de réduction de gaz à effet de serre. Malgré cette prérogative, le gouvernement fédéral ignore simplement le protocole de Kyoto. Peut-être devriez-vous repenser votre compréhension des mécanismes multilatéraux en lien avec votre argumentaire dans le contexte politique actuel?
Pistes de solutions
Votre appel pour un débat public est probablement un des seuls éléments créant un consensus au Canada actuellement. Siégeant sur plusieurs comités de bibliothécaires étudiant le droit d’auteur, je peux vous affirmer le désir sincère de notre communauté de trouver une solution raisonnable, qui favorise un équilibre entre les intérêts des parties dans les questions des droits des usagers numériques. Nous attendons patiemment depuis dix ans une volonté politique en ce sens. Le temps est venu de penser à une politique du droit d’auteur au profit d’une culture digne de ce 21e siècle de moins en moins jeune et de la diversité culturelle.
Canada Droits des citoyens Parlement Pétition
Pétition pour le droit des usagers
Olivier Charbonneau 2006-11-11
Le site P2PNet nous informe que le député Charlie Angus a déposé une pétition au parlement du Canada concernant les droits des usagers dans l’arène numérique.
Voici ce que l’Hansard révisé (39e Législature, 1re session, no. 075, jeudi 2 novembre 2006) a reporté concernant les propos de l’honn. M Angus :
M. Charlie Angus (Timmins—Baie James, NPD)
Monsieur le Président, j’ai l’honneur de présenter deux pétitions à la Chambre aujourd’hui.
La première est signée par des gens de partout au Canada et concerne la mise au point d’une nouvelle loi sur le droit d’auteur qui tiendrait compte de l’équilibre délicat entre les droits du créateur et un droit d’utilisation équitable pour le public. Étant donné que les technologies numériques ont récemment donné aux détenteurs de droits d’auteur la capacité de compromettre l’équilibre traditionnel prévu dans la Loi sur le droit d’auteur en empêchant les Canadiens d’avoir un accès équitable à des oeuvres comme ce devrait être le cas, les pétitionnaires demandent au Parlement de veiller à ce que les utilisateurs soient reconnus comme parties intéressées dans toute décision future concernant le droit d’auteur et de veiller à ce que toute modification de fond de la Loi sur le droit d’auteur maintienne la notion d’utilisation équitable et les droits des utilisateurs à un accès équitable aux oeuvres.
Bibliothécaire France Information et savoirs Internet Journaliste Rapport et étude Utilisation équitable
Le droit et la presse
Olivier Charbonneau 2006-11-11
L’Association des professionnels de l’Information et de la Documentation (ADBS) annonce la publication d’un nouveau livre :
Le panorama de presse : aspects juridiques, Michèle Battisti
Coll. L’essentiel sur… (ISSN 1773-729X), ADBS Editions, 2006
64 pages – ISBN 2-84365-084-4 / 978-2-84365-084-0
Prix de vente : 15,00 € TTC
Selon le communiqué de presse, l’auteure Michèle Battisti assure depuis 1998 une veille juridique auprès de l’Association des professionnels de l’information et de la documentation (ADBS). Elle publie, chaque mois, une lettre juridique électronique intitulée «Actualités du droit de l’information». Par ailleurs, voici le descriptif du livre :
Le traitement de la presse, une réponse à des besoins d’information
Les entreprises et les administrations ont éprouvé depuis longtemps le besoin de reprendre les informations d’actualité relatives à leur secteur d’activité et à leur environnement. A cet effet, elles ont créé des revues de presse. S’il est probable que les évolutions techniques feront évoluer la forme de ce produit documentaire, l’accès à l’information de presse restera un besoin fort.
Des débats juridiques autour de la revue de presse sur support papier
Les aspects juridiques de la revue de presse avaient donné lieu à de vifs débats lors de l’adoption de la loi relative à la gestion collective du droit de reproduction par reprographie, le 3 janvier 1995. Baptisé « panorama de presse » pour le dissocier du produit réalisé par les journalistes, les polémiques n’en ont pas moins perduré au cours des années qui ont suivi.
… et des sources d’incertitude sur le support numérique
Il semblait aussi nécessaire de faire le point sur le traitement juridique de ce produit au moment de l’adoption en France de la loi sur les droits d’auteur et les droits voisins dans la société de l’information (DADVSI). La revue de presse suscite encore, en effet, de nombreuses interrogations, notamment dans l’environnement électronique.
ADBS – L’Association des professionnels de l’Information et de la Documentation
25, rue Claude Tillier, 75012 – PARIS adbs@adbs.fr
Tél: 01 43 72 25 25 – Télécopie: 01 43 72 30 41
Bibliographie Droit d'auteur France Histoire et sciences sociales Réforme
Bibliographie sur l’histoire du droit d’auteur en France
Olivier Charbonneau 2006-11-11
Tel qu’indiqué dans un billet précédent, une collègue nous a demandé d’explorer des sources sur le développement historique du droit d’auteur en France, particulièrement du 17e au 19e siècle. Voici donc la liste :
Livre :
Studies on Voltaire and the eighteenth century : 373, par Voltaire Foundation. Éditeur : Oxford : Voltaire Foundation, 1999. ISBN : 0729407012. Contient :
* ‘A propos des écrits le théâtgre au dix-huittième siècle,’ by Claude Jaecklé-Plunian
* McMeekin, Sean A. « From Beaumarchais to Chénier: The droits d’auteur and the Fall of the Comédie Française, 1777-1791. » Studies on Voltaire and the Eighteenth Century (Oxford: Voltaire Foundation, 1999). Pp. v + 371.
Des articles (ordre chronologique) :
Titre : Règlements royaux et règles du jeu : la Comédie Française, les auteurs dramatiques et la propriété intellectuelle à l’Age des lumières
Source : Revue d’histoire moderne et contemporaine , vol. 51, no 1, janv.-mars 2004, p. 117-128
Auteur : Brown, Gregory S.
Titre : A Propos des Écrits sur le Théàtre au Dix-Huitième Siècle (Book).
Source : French Studies; Apr2001, Vol. 55 Issue 2, p246, 2p
Auteur : Dunkley, John
Titre : Rousseau et ses éditeurs
Source : Revue d’histoire moderne et contemporaine , vol. 40, no 1, janv.-mars 1993, p. 120-136
Auteur : Birn, Raymond.
Titre : After the fall: the chute of a play, droits d’auteur, and literary property in the Old Regime
Source : French Historical Studies v 22 no4 Fall 1999. p. 465-91
Auteur : Brown,-Gregory-S
Titre : Le siècle d’or du plagiat littéraire [en France]
Source : Histoire , no 152, févr. 1992, p. 72-75
Auteur : Mollier, Jean-Yves.
Titre : Authors vs. playwrights: the two authorship systems of the Old Regime in France and the repercussions of their merger
Source : Theatre Journal v 44 Dec 1992. p. 501-14
Auteur : Le-Hir,-Marie-Pierre
Titre : Reading signatures: female authorship and revolutionary law in France, 1750-1850
Source : Eighteenth/Century Studies v 22 Spring 1989. p. 469-87
Auteure : Hesse,-Carla
Dissertations :
De l’archeologie du droit d’auteur a la philosophie du droit de la traduction
Basalamah, Salah. Proquest Dissertations And Theses 2005. Section 0992, Part 0290 584 pages; [Ph.D. dissertation].Canada: Universite de Montreal (Canada); 2005. Publication Number: AAT NR05517.
Moral rights: A comparative history of their development and application in civil and common law jurisdictions
Dickson, Craig James. Proquest Dissertations And Theses 2005. Section 0779, Part 0398 99 pages; [LL.M. dissertation].Canada: University of Toronto (Canada); 2005. Publication Number: AAT MR07333.
Literary recycling: Authorship, adaptation, and the circulation of the stories of Pamela and the Gambler in 18th-century Europe
Blood, Elizabeth Ann. Proquest Dissertations And Theses 1998. Section 0016, Part 0295 345 pages; [Ph.D. dissertation].United States — Massachusetts: Boston College; 1998. Publication Number: AAT 9828040.
Le livre en trompe l’oeil ou le jeu de la dedicace: Montaigne, Scarron et Diderot
Piroux, Lorraine Marie. Proquest Dissertations And Theses 1996. Section 0163, Part 0313 268 pages; [Ph.D. dissertation].United States — Illinois: Northwestern University; 1996. Publication Number: AAT 9632761.
Le faux litteraire
Martineau, Yzabelle. Proquest Dissertations And Theses 1995. Section 0781, Part 0679 341 pages; [Ph.D. dissertation].Canada: McGill University (Canada); 1995. Publication Number: AAT NN08133.
The making of Montaigne’s « Essais ». Book-selling, technology, and creation in the late French Renaissance
Hoffmann, George Paul. Proquest Dissertations And Theses 1990. Section 0246, Part 0298 342 pages; [Ph.D. dissertation].United States — Virginia: University of Virginia; 1990. Publication Number: AAT 9112023.
‘LIVRETS’ OF BALLETS AND PANTOMIMES DURING THE FRENCH REVOLUTION (1787-1801)
BENNAHUM, JUDITH CHAZIN. Proquest Dissertations And Theses 1981. Section 0142, Part 0313 431 pages; [Ph.D. dissertation].United States — New Mexico: The University of New Mexico; 1981. Publication Number: AAT 8201942.